Dossier «L'Affaire du RER D» — Le Monde Fermer la fenêtre

France

Jean-Pierre Raffarin promet un meilleur suivi des victimes d'actes racistes et antisémites
LE MONDE | 11.07.04 | 15h55    MIS A JOUR LE 12.07.04 | 13h04
Le nombre d'agressions a doublé en six mois.

"Passer à la vitesse supérieure". C'est ainsi que Jean-Pierre Raffarin a défini les objectifs de l'action des pouvoirs publics lors d'un comité interministériel de lutte contre le racisme et l'antisémitisme réuni à Matignon, vendredi 9 juillet. C'est la cinquième réunion tenue sur ce thème depuis novembre 2003. Au lendemain du discours du président de la République au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire) appelant à un "sursaut" des autorités contre l'intolérance (Le Monde du 9 juillet), le premier ministre a tenu a montrer la détermination des pouvoirs publics à se mobiliser contre un fléau qui touche gravement la société française.

Les derniers chiffres de recensement des actes racistes et antisémites ne cessent d'inquiéter. Le bilan du premier semestre montre "une accélération très forte"des actes et injures comptabilisés, précise Jean-François Copé, porte-parole du gouvernement : "Pour les seuls premiers six mois 2004, ils sont en nombre plus important que pour la totalité de l'année 2003."

Ainsi les agressions antisémites sont au nombre de 135, contre 127 pour l'ensemble de l'année 2003, tandis que 376 menaces ont été répertoriées. Les actes racistes (visant les Maghrébins et les Noirs) ont atteint le chiffre de 95, contre 51 en 2003 ; 161 menaces ont été enregistrées. A Matignon, on estime qu'"on est incontestablement en présence d'une tendance de fond inquiétante".

Pour renforcer les actions de l'Etat et mobiliser davantage ses services, M. Raffarin réunira "début septembre" l'ensemble des préfets et sous-préfets pour un recensement des actions entreprises dans la lutte contre la xénophobie et l'antisémitisme. Il s'agira de les sensibiliser à l'urgence de la situation et de les inciter à renforcer leurs liens avec les maires et les associations locales pour assurer un recensement plus efficace des actes commis et un meilleur suivi des victimes. Les sous-préfets sont appelés à s'engager dans des initiatives civiques.

Le gouvernement veut aussi démontrer sa sévérité accrue contre les actes commis. Des instructions ont été données par le garde des sceaux afin que les parquets requièrent des peines "les plus exemplaires" à l'encontre des actes commis. "Toute personne qui commet un acte raciste ou antisémite doit être poursuivie avec détermination et condamnée à la hauteur du caractère inacceptable de ces actes", a rappelé M. Copé. Le ministre de la justice a réinsisté pour que tous les parquets nomment un "magistrat référent" chargé de coordonner l'action publique dans ce domaine. L'écrivain Jean-Pierre Rufin s'est vu confier une mission par le ministre de l'intérieur afin de faire des " propositions concrètes" en septembre, notamment un plan d'action visant à renforcer la répression.

VADE-MECUM DES SAISINES

Améliorer la coordination des services de l'Etat semble bien la clé de l'action voulue par le gouvernement. Ainsi, une circulaire doit être publiée, "dans les jours prochains", pour formaliser la coopération entre les services des ministères de l'éducation nationale, de l'intérieur et de la justice. Constatant que les chefs d'établissement ne savent pas toujours quelle démarche entreprendre, le texte fixera un "protocole d'action et de relation", une sorte de vade-mecum des saisines et signalements dès qu'un acte à caractère raciste ou antisémite est repéré dans un établissement. Pour Matignon, ce dispositif ne remet pas en cause le processus interne de sanction propre à l'éducation nationale, mais, explique un conseiller, "il y a nécessité à rappeler aux services de police, aux parquets et aux personnels éducatifs l'importance de l'intervention, de l'information et de la prise en charge des victimes".

Sylvia Zappi

 ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 11.07.04